En octobre 2024, le milieu de l’investissement responsable s’est rendu à Toronto pour la conférence PRI in Person où le réseau des Principes pour l’investissement responsable (PRI), développé par les Nations unies, se réunissait pour partager et préconiser des pratiques exemplaires. Addenda Capital, la Coalition des grands projets des Premières Nations (FNMPC) et le Conseil de gestion financière des Premières Nations (CGF) ont profité de l’occasion pour réunir des dirigeants autochtones, des émetteurs de titres de créance, des propriétaires d’actifs et des chefs de file de la finance durable dans le cadre d’une table ronde ciblée.

Selon les règles de Chatham House, les participants ont eu l’occasion d’apprendre, d’interagir et de partager des idées sur la façon de tirer parti du succès du marché des obligations durables afin de répondre aux besoins de financement des peuples autochtones. Ils ont examiné la possibilité de développer un cadre de référence pour les obligations durables autochtones afin de susciter l’intérêt des investisseurs et de mobiliser des capitaux, tout en veillant à ce que les fonds soient consacrés au financement de projets présentant des avantages démontrés pour les communautés autochtones.

Cette discussion sans précédent a conduit à l’élaboration d’un document de travail complet et de trois articles portant sur les aspects clés de cette initiative. Le premier article traitait des défis de la finance autochtone, tandis que le dernier se penchera sur les actions nécessaires pour aller de l’avant.

Première vague d’obligations vertes

Les obligations vertes, sociales et durables sont devenues l’une des principales réussites de l’investissement responsable. Depuis leur première émission en 2007, ces titres de créance ont atteint plus de 5 000 milliards[1] de dollars US. Ils permettent de financer des projets dont les résultats environnementaux ou sociaux sont mesurables et positifs, sur la base de pratiques et de principes fondamentaux (Illustration 1). Cette réussite offre de précieuses leçons pour le développement de solutions financières autochtones.

Illustration 1 :

Croissance des obligations durables par type

Source : Climate Bonds Initiative

La force du marché des obligations durables

Les obligations vertes permettent d’amasser du capital pour financer des projets comportant des avantages environnementaux (p. ex. : amélioration de l’efficacité énergétique ou transport propre). Les fonds sont réservés à des projets admissibles et les émetteurs de ces obligations s’engagent à rendre compte au moins une fois par an de leur impact positif. Les obligations sociales fonctionnent de la même façon, mais mettent l’accent sur des projets comportant des avantages axés sur la société et la communauté (p. ex. : soins de santé ou logement abordable). Pour leur part, les obligations durables combinent les avantages des obligations vertes et sociales.

Liens entre le financement autochtone et la finance durable

Comme on peut s’y attendre, la finance autochtone et la finance durable partagent des caractéristiques et des objectifs :

  • elles sont souvent fondées sur des valeurs;
  • elles ont souvent une orientation à long terme (sept générations); et
  • elles tiennent compte de la biodiversité et des effets externes sur l’environnement, en plus de tenir compte de l’impact sur les personnes et les collectivités.

On estime que 36 % des forêts encore intactes dans le monde se situent sur les terres autochtones et que les communautés protègent une grande partie de la biodiversité restante dans le monde[2]. La finance durable et les peuples autochtones préconisent tous deux la transition climatique. L’exploitation des ressources minérales essentielles à la transition énergétique ainsi que les lignes de transmission pour la production d’électricité traversent des terres autochtones et requièrent la consultation ou le consentement des communautés autochtones[3].

Leçons tirées des obligations vertes

Au fil du temps, l’établissement des Principes sur les obligations vertes (Green Bond Principles, GBP) et des directives sectorielles a permis de dresser une « liste de besoins ». Cette démarche a permis d’établir des pratiques exemplaires et de gagner en crédibilité, tout en attirant des capitaux afin de contribuer à répondre à ces besoins[4][5]. Les éléments clés sont les suivants :

  • Utilisation du produit
  • Processus d’évaluation et de sélection des projets
  • Gestion du produit
  • Rapports

La combinaison des principes et des lignes directrices du secteur (ce que les investisseurs appellent souvent une « taxonomie ») a contribué au maintien de la crédibilité du marché des obligations vertes et de la confiance des investisseurs à son égard, ce qui a permis de financer des projets axés sur le climat, la société et la durabilité totalisant des milliers de milliards de dollars. Heureusement, on observe également une forte demande potentielle des investisseurs canadiens et mondiaux pour des obligations qui soutiennent les peuples autochtones.

La demande pour les obligations de l’Autorité financière des Premières Nations (AFPN) témoigne de cet engouement, de nombreux investisseurs européens démontrant de l’intérêt ou faisant l’achat d’obligations. Par exemple, plusieurs émetteurs, comme les gouvernements provinciaux et fédéraux, les banques de développement, les institutions financières et les sociétés, ont établi des cadres de référence en matière d’obligations vertes et durables qui comprennent des objectifs relatifs au financement autochtone. En Australie et au Canada, les sociétés développent de plus en plus de plans d’action de réconciliation (PAR) qui peuvent tenir compte d’objectifs mesurables.

Certaines des leçons tirées du marché des obligations vertes peuvent contribuer grandement au financement autochtone. L’Indigenomics Institute rapporte des avantages potentiels des plus intéressants, soit un apport éventuel de plus de 100 milliards de dollars, ou 5 % du PIB canadien, avec d’importantes retombées sur le reste de l’économie.

Le marché des obligations durables offre des leçons cruciales pour le développement de la finance autochtone. Un cadre bien conçu, s’appuyant sur des principes et des lignes directrices solides, pourrait contribuer à la création d’un marché obligataire autochtone qui attire des capitaux pour aider à combler les écarts de financement et répondre aux besoins des communautés autochtones. Le cadre des obligations durables autochtones pourrait faire l’objet de modifications et s’inspirer des éléments fondamentaux des principes des obligations autochtones afin d’améliorer les émissions d’obligations (même celles qui ne sont pas vertes).

Pour une analyse complète des défis et des possibilités en matière de financement autochtone, veuillez consulter notre document de réflexion complet.

 

[1] Sauf indication contraire, tous les montants du présent document sont indiqués en dollars canadiens. 

[3] Y compris, dans de nombreuses juridictions, tant au Canada qu'à l'étranger, le consentement libre, préalable et éclairé (CLPE)

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