Dans le cadre d’un scrutin vu par beaucoup comme un référendum sur la présidence de Donald Trump et son programme, les électeurs américains ont choisi de restreindre le pouvoir législatif du Président et du Parti républicain. Depuis l’élection présidentielle en novembre 2016, les républicains ont eu la mainmise totale sur les leviers du pouvoir fédéral, détenant une majorité des sièges à la Chambre des représentants (235 sièges sur 435), 51 des 100 sièges au Sénat et le pouvoir exécutif de la présidence. À l’issue des élections de mi-mandat de mardi, les démocrates ont repris le contrôle de la Chambre des représentants, ayant acquis au moins 221 sièges. Parallèlement, les républicains ont augmenté légèrement leur majorité au Sénat, avec un gain net de deux sièges parmi les 35 sièges mis en jeu.

Pour ceux qui se concentrent sur la portée politique de cette élection, la participation record de 113 millions d’électeurs pour une élection de mi-mandat devrait en témoigner. À partir de maintenant, le Président devra composer avec une Chambre démocrate plus forte et hostile à de nombreuses priorités établies par les républicains. Ainsi, nous ne devrions pas nous étonner que le Président utilise les décrets comme moyen rivilégié de faire avancer son programme, outrepassant leur cadre habituel. Cette situation pourrait s’avérer aussi divertissante qu’une émission de télé-réalité alors que Donald Trump tentera d’appliquer ses méthodes de « l’art de la négociation » auprès de Nancy Pelosi, probablement la prochaine présidente démocrate de la Chambre.

Conséquences économiques et répercussions sur les marchés

Les marchés financiers ont lâché un soupir de soulagement lorsque les résultats de ces élections de mi-mandat se sont révélés conformes aux prédictions dans l’ensemble. Les marchés boursiers ont progressé le jour suivant le scrutin et les cours obligataires sont restés stables ou ont légèrement augmenté à l’échelle mondiale. Les spécialistes des sondages et les commentateurs ont également été soulagés de rétablir une partie de leur crédibilité qui avait perdu la cote après la dernière élection présidentielle qui avait contredit leurs prévisions.

En général, les marchés réagissent violemment aux mauvaises surprises. Heureusement, cette élection n’en réservait aucune. De plus, les investisseurs comprennent qu’aux États-Unis, en raison des Pères fondateurs, la structure politique favorise la possibilité d’une base de pouvoir divisée. Une division après une élection de mi-mandat doit être considérée comme un résultat fréquent plutôt qu’une exception dans la deuxième moitié d’un premier mandat présidentiel. En outre, elle préserve le statu quo des politiques actuelles. Les investisseurs sont convaincus que les retombées économiques positives de la réforme fiscale des sociétés américaines et de la déréglementation ne seront pas perdues. Toutefois, ce changement dans le pouvoir politique met fin aux espoirs de nouvelles mesures de relance budgétaire sous la forme de réductions d’impôt supplémentaires et d’autres dépenses en défense ainsi qu’en infrastructures en  plus de celles déjà affectées. Cette situation pourrait même être vue comme un changement souhaitable des priorités budgétaires, en raison des éventuelles conséquences inflationnistes de nouvelles mesures de relance à ce stade avancé du cycle économique.

En outre, l’important déficit budgétaire actuel ainsi que la croissance de la dette publique pourraient reprendre leur place au centre du débat. Les démocrates ne manqueront pas d’essayer d’appliquer une pression politique maximale lorsque le Congrès se penchera sur le relèvement du plafond de la dette en mars. Ils feront de même lors des débats sur l’autorisation de l’affectation des crédits supplémentaires pour relever des plafonds budgétaires stricts en défense et d’autres dépenses intérieures en octobre. En plus de la tendance haussière soutenue du taux directeur, ce regain d’intérêt pour le déficit et la hausse des frais d’intérêt devrait accentuer la variabilité du rendement des obligations. Les politiques commerciales, un point d’intérêt particulier pour les marchés, pourraient aussi ressentir les effets de ce changement. Dans l’immédiat, l’adoption par la Chambre du nouvel Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC) qui vise à remplacer l’ALÉNA revêt une grande importance pour les perspectives économiques du Canada. Les démocrates n’ont pas toujours été les plus grands défenseurs du libre-échange et ils ne devraient pas concéder une victoire facile au Président Trump en avalisant l’accord. Ainsi, ils pourraient tenter de modifier certains éléments et d’en retarder la mise en oeuvre. Cette situation pourrait raviver une certaine incertitude quant aux perspectives du commerce international et provoquer de la volatilité, notamment des taux de change sur le dollar canadien et le peso mexicain. 

Enfin, l’influence de cette élection de mi-mandat sur la persistance du cycle économique actuel s’avèrera vraisemblablement négligeable tout au plus. Les récessions surviennent habituellement en réaction à une politique monétaire très restrictive, lorsque l’inflation devient une menace sérieuse ou que les excès financiers provoquent une crise de liquidité. Dans le cycle actuel, les forces inflationnistes restent contenues jusqu’à maintenant et aucun excès financier n’est réputé avoir atteint une ampleur inquiétante. Cela ne veut pas dire pour autant que la hausse de la croissance ne rencontrera pas d’obstacles à mesure que l’expansion suivra son cours. C’est une possibilité, mais nous estimons que la probabilité d’une récession imminente reste faible.

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